Covid 19 : une opportunité pour les entreprises de renforcer l’engagement et l’agilité?
Lorsqu’elle est arrivée sur le plateau, j’ai immédiatement remarqué son col roulé noir et ses traits tirés. Elle n’avait pas dit un mot. Même avec la distance, cette apparition singulière m’avait mis la puce à l’oreille : quelque chose d’important s’était peut-être produit pour elle.
Aujourd’hui, avec le télétravail et ce masque bien nécessaire, qui barre toute une partie du visage, je réalise tous les signes de la communication non verbale dont je suis privée. Ils me permettaient en un clin d’œil de capter la dynamique individuelle et collective d’une équipe.
Il m’a donc fallu près d’un an pour comprendre pourquoi je me sentais moins efficace dans mon travail de manager de projets de transformation. Cette information cruciale : « comment vont les gens », pour savoir comment me comporter et à quel rythme je peux travailler avec eux ; cette information cruciale me prend infiniment plus de temps à glaner. La plupart du temps, je dois me fier aux mots, au ton et parfois à un regard mal éclairé qui apparaît sur mon écran.
Alors je prends le temps nécessaire pour que chacun mette des mots, non seulement sur « comment il se sent » dans cette période complexe qui n’en finit pas, mais aussi sur « comment il vit le projet et les travaux menés ».
Oui, cela prend plus de temps, plus d’énergie, mais suis-je vraiment moins efficace, moi dont le métier est d’accompagner les entreprises à créer des collectifs forts et agiles ?
Mettre des mots pour remplacer tous les signaux envoyés par la communication non verbale permet une plus grande conscience de nos actes et ressentis. Nommer les choses, c’est le début du recul, la porte ouverte au questionnement individuel et collectif.
Les mots passent plus facilement par la conscience que le non verbal. Faire un retour positif / négatif à l’oral va peser différemment. Et comme tout un chacun prononce moins de mots qu’il ne fait de signes, j’ai observé que pour compenser le manque de signaux, je suis plus loquace depuis 1 an : je fais plus de feedbacks oraux. De surcroît, je ressens tout le bien que cela procure de part et d’autre : l’isolement contraint est en partie rompu.
J’ai pu aussi constater le bienfait de marquer et développer les rituels en entreprise. Ce sont des opportunités pour donner corps à la cohésion d’un groupe. Se retrouver physiquement ou virtuellement à intervalles réguliers nous rassure. Célébrer aussi des caps, jalons franchis ensemble sert également à resserrer ces liens distendus et donne matière au cheminement du collectif.
Au final, ces moments difficiles sont peut-être autant d’opportunités pour cultiver le collectif et améliorer la qualité du management dans les entreprises. A accorder un temps de qualité, en donnant de l’importance à la parole échangée, je suis persuadée que les collectifs seront plus engagés et agiles pour relever des défis.
Et concernant ma société, il sera intéressant de sonder nos clients sur l’évolution de nos pratiques : sommes-nous plus pertinents en allant de cette manière cultiver la prise de conscience des individus et des collectifs ?
_________________________________________________________________________________________________ Dorothée Moyal _____________________________________
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